L'obscurité, son pire ennemi. Lorsque les lumières se sont rallumées elle était soulagée, et puis hop lumières ré-éteintes, laissant l'amoureuse des fleurs en panique, mais cette fois, pas toute seule.

Alors que sa respiration s'accélère, Luca la rassure et lui prend la main. Elle souffle un peu. Dans l'obscurité, c'est rassurant de tenir la main de quelqu'un. Elle sait qu'il doit être mal au-moins autant qu'elle, alors elle le remercie d'une petite voix tandis que le petit groupe erre sans trop savoir où se diriger, à la question de Luca elle répond.

- La passerelle des langues serait logique mais... risquer de nous retrouver face à des portes fermées...encore...

A dire vrai, la pâle lune la rassure et rester dehors serait mieux pour son petit coeur, les bâtiments plongés dans le noir, non merci. Mais quitte à choisir, elle préfère être dans le noir avec son groupe, que d'être seule avec les rayons de la lune pour seule compagnie.

La passerelle des langues se rapproche. Au vu des fenêtres, aucune perspective de luminosité à l'intérieur. Elle serre sa main autour de celle de Luca. Fort. Son pas se fait hésitant.

- Je... Je crois pas qu'on ait le choix, là, maintenant...

Elle attend l'avis des autres membres du groupe et leurs jette un coup d'oeil. Elle ne distingue que leur silhouette. Elle n'est pas rassurée. Si elle tape un malaise, ils sont mal.

Elle s'en veut. Elle s'en veut tellement d'être un boulet de service. Le professeur Jad a déclaré pouvoir la porter alors que, physiquement, elle, ça va, celui qui la rassure en aurait plus besoin ; et pourtant elle est là à jouer les épines dans le pied du groupe à cause d'une putain de phobie du noir. D'un côté elle a honte de se faire aider par un Luca déjà mal en point, en temps normal, elle aurait prit soin de lui mais là... Là, elle est trop tétanisée, elle ne peut s'empêcher d’hyper-ventiler quand elle pense à l'absence de luminosité. C'est pourquoi, en voyant que les portes du bâtiment plongé dans le noir ne s'ouvrent pas, elle pousse un soupir de soulagement, avant de se rendre compte que c'est égoïste. Ils cherchent tous une solution à leur situation mais elle, ne se préoccupe que du fait de pouvoir esquiver l'ombre. Bravo putain d'égoïste.

Elle peut pas rester comme ça... Réfléchis Gari. Un truc. Que tu ne sois pas totalement inutile. Un autre bâtiment ? Une porte ? Un truc quoi. Oublie ta phobie deux minutes, t'as une information qui peut vous aider, tu le sais. Une porte ? Oui ! Une porte ! Elle déglutit avant de déclarer, d'une voix qu'elle veut assurée :

-Je... J'ai du mal à me repérer à cause...du noir... mais je crois qu'il y a une autre porte si on contourne un peu le bâtiment...

Il lui semble avoir déjà vu des étudiants et des professeurs fumer devant.


En espérant qu'elle ne se trompe pas, elle prend les devants, indiquant aux autres de la suivre, et se met à marcher dans la direction qu'elle a indiqué, entraînant Luca avec elle par la-même occasion car elle a beaucoup trop peur pour le lâcher. Elle va lui briser la main à force de la serrer comme ça.

Oui. Miss "peur du noir" va jouer les guides... dans le noir.

Lorsque le Romeo a sorti ses clés, Gari a sorti avec un naturel déconcertant :

- Et tu... ne pouvais pas t'en souvenir avant ?

Pas méchante la remarque ; c'est juste que ses pensées franchissent ses lèvres telles quelles, sans filtres, et ce, même lorsqu'elle est en mode petit canard effrayé. La scène est d'ailleurs ridicule avec elle qui fait des remarques de ce genre tandis qu'elle tient la main du professeur à ses côtés.

Luca est le premier à suivre l'agent d'entretien. Tout le monde fait de même, se séparer, c'est pas une bonne idée.

Lorsque ceux qui la précèdent pénètrent enfin dans le bâtiment. Elle se dit qu'il va falloir suivre. Elle lâche brièvement la main de Jad. Elle veut montrer qu'elle gère la situation, comme les autres. Elle prend une grande inspiration et entre.

C'est bon. C'est bon. C'est bon. C'est b.... pas bon du tout, il fait noir. Trop noir. Elle entend seulement les voix des autres mais ne les voit pas. Elle recule de quelques pas, prête à faire demi-tour. Tant pis, elle va rester seule. En reculant, elle rencontre au passage le corps de Jad qui la suivait. Elle tourne sa tête, ne le voit pas, elle ne cherche même plus à prendre sa main, comment peut-elle être sûre que c'est lui d'abord ? C'en est trop à supporter pour elle. Elle se laisse tomber à terre et se recroqueville sur elle-même. Sa voix tremble.

- JE PEUX PAS C...C'EST... CA JE PEUX PAS OK ? ALLEZ-Y TOUT SEULS !

Des larmes coulent sur ses joues et elle a beau les essuyer, elles reviennent. Elle ne veut pas les ralentir, et elle sait que c'est con de s'arrêter pour ça, mais sa peur du noir la bouffe toute crue.

Elle tremble. Elle ne s'arrête pas de trembler. Même lorsque Jad vient l'enlacer pour la rassurer. Elle enfuit sa tête tout près du torse de celui qui se propose pour rester. Elle tremble et elle est désolée de les ralentir. Elle les entend décider de se séparer. A cause d'elle.

Précautions prises, Romeo et Luca s'éloignent. Elle a envie de leur dire de faire attention et qu'elle est désolée. Les mots ne sortent pas.

Elle entend encore le pessimisme dans la voix de Romeo et... elle veut croire qu'ils reviendront. Sains et saufs. Elle trouve ça culotté de sa part, le fait d'espérer, alors qu'elle...elle, n'arrive même pas à bouger. Les pas de ses deux compagnons partis en éclaireur ne sont plus qu'un lointain souvenir quand elle commence à se calmer, et qu'elle se desserre de l'étreinte du professeur ; seulement, un cri résonne soudainement, un cri qui la replonge dans un mal-être indéfinissable. C'est eux. Non... Ils se sont faits.... Ils se sont... Gari plaque ses mains sur ses oreilles, le flot de larmes augmente. Ses lèvres bougent mais rien n'en sort. Sa main se pose sur le bras de Jad et se serre. Elle veut bouger mais ses jambes n'y arrivent pas.

N'en reste plus que deux.

Alors qu'elle relève la tête, ses yeux cherchent le visage de Jad, elle commence à distinguer ses traits. Elle ne s'arrête pas de pleurer. Elle ne s'arrête pas de trembler. Pourtant, il semble que le jour, dehors, est en train de se lever, elle devrait être rassurée. Mais elle ne s'arrête pas de pleurer. Elle ne s'arrête pas de trembler.

Elle ne s'arrête pas de pleurer. Elle ne s'arrête pas de trembler.