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T'as envie de fermer les yeux, d'avancer à l'aveugle, te fier entièrement à eux, à cette main à laquelle tu t'accroches désespérément. T'as envie de fermer les yeux, de te plonger entièrement dans le noir, parce que la nuit noire ne l'est pas tant que ça, pour toi. Cette nuit-là se fait si colorée. Du rouge danse devant tes yeux, dans toutes ses différentes teintes, à chaque cri entendu. Et il y a des voix que tu ne veux pas entendre - des voix que tu ne veux pas voir. La peur te grignote un peu plus ta raison à chaque pas que vous faîtes, mais vous l'atteignez, votre destination. C'était long, d'en arriver jusqu'ici, mais vous y êtes ; il n'y a plus qu'à prier que vous ne le regretteriez pas.

Aussitôt, tu écoutes - tu vois - Ciel qui appelle Ran. Tu tends l'oreille, tu ouvres grand les yeux. Là, ce n'est plus le moment de se cacher des voix des autres, là, tu dois attraper celle du garçon, du petit blond qui vous a sauvé, averti du danger. Tu te joins à Ciel, en employant ta voix la plus douce, même si tu ne peux l'empêcher de trembler un peu, incapable de masquer ta crainte, ton inquiétude.

Ran ? S'il te plaît, réponds-nous, on ne te veut aucun mal...

Cette fois, ce noir profond, uniquement interrompu de vos voix, de ce doux bleu et ce délicat violet, il te terrifie. Il te dégoûte, aussi. Tu voudrais récupérer la couleur de Ran, qu'il envahisse ton champ de vision, qu'il te ravisse les oreilles. Tu veux qu'il soit là, en vie. Tu le cherches, en tournant la tête dans tous les sens, tu le cherches activement ce profond rose, à la limite du violet, que s'il n'avait pas été là pour vous apprendre l'horreur de l'extérieur, tu l'aurais tant aimé. Tu finis par lâcher la main de Ciel, après avoir jeté un regard aux deux autres, réalisant que le doré de Noah ne se manifeste pas - il est toujours là, ceci dit, tu le sais, mais il reste muré dans un silence que tu ne peux que comprendre. Puis tu t'aventures à tâtons, dans l'obscurité, pour chercher dans une zone plus vaste, pour être sûr de ne pas le rater.